Séance 2 1. Pour lutter contre la peste, les autorités ferment les portes de la ville et filtrent les allées et venues. Elles isolent également certains quartiers particulièrement atteints par le fléau. Elles utilisent les fours crématoires pour brûler les corps des victimes de l’épidémie. 2. Cette maladie est connue des hommes depuis longtemps, ses ravages ont marqué leur mémoire. Des moyens de lutte ont peu à peu été élaborés, essentiellement fondés sur l’isolement et la séparation des malades : « on eut l’idée d’isoler certains quartiers », « à l’extérieur des portes ». Les corps étaient enterrés de nuit (« au cœur de chaque nuit ») ou incinérés (« Il fallut bientôt conduire les morts de la peste eux-mêmes à la crémation »). 3. La cohésion sociale n’est plus respectée puisque les autorités préfectorales isolent les habitants de certains quartiers des autres citoyens de la ville, les privant ainsi de liberté. Une différence, une discrimination s’installe donc entre les membres d’une même société. 4. Les décisions sont prises sans concertation avec la population, sans débat ni annonce ou explication publique (« Un arrêté préfectoral expropria… »). L’autorité préfectorale ou municipale apparaît très impersonnelle : multiplication du pronom indéfini « on » (« on achemina », « on dut utiliser », « on reporta »). Cette autorité apparaît par ailleurs très prudente (accumulation des mesures prises), tatillonne et soucieuse du bon fonctionnement des décisions prises, veillant au moindre détail : « On reporta plus loin le piquet de garde et un employé de la mairie facilita beaucoup la tâche des autorités en conseillant… »). 5. Le roman évoque les horreurs du nazisme. À travers la description des quartiers isolés du reste de la ville, Camus fait allusion aux camps d’isolement et aux ghettos où, dans certaines cités d’Europe, était regroupée la population juive. Et lorsque le narrateur indique que l’on achemine des cadavres vers un « four crématoire », il fait une allusion aux fours crématoires dans lesquels les nazis ont brûlé des milliers d’hommes, de femmes et d’enfants. Quant à la description de l’administration, elle a pour but de dénoncer celle du gouvernement de Vichy dans sa politique de collaboration et celle des nazis eux-mêmes dans la précision de leur organisation administrative pour gérer « la solution finale ». Le tableau de Francine Mayran dénonce lui aussi les crimes nazis à travers des éléments hautement symboliques : les wagons, la voie ferrée. 6. La peste est associée à la fois aux flammes et à une odeur. Elle est ainsi décrite comme un monstre, une sorte de Minotaure qui dévore chaque soir son tribut. Cet être maléfique instaure un « nouvel ordre » auquel les habitants de la ville sont soumis. En imaginant le mal dans le monde sous la forme d’une maladie implacable, la peste, assimilée à un monstre à la puissance maléfique, Camus a créé un mythe. Séance 3 1. Les expressions qui montrent la faiblesse de l’enfant : « gémissement grêle », « frêle carcasse », « épuisé », « jambes osseuses », « ses bras dont la chair avait fondu », « secoué de frissons et tremblements convulsifs ».... Elles suggèrent un registre pathétique. 2. Camus fait une description très réaliste de la souffrance et de la mort de l’enfant en citant de nombreux détails : « se pliait », « gémissement », « frissons et tremblements convulsifs », « carcasse », « la fièvre », « se recroquevilla », « visage plombé », « jambes osseuses », « bras dont la chair avait fondu en quarante-huit heures », « lit dévasté », « un seul cri continu ». Ces expressions relèvent d’un ton neutre et accentuent l’impression de vérité, d’authenticité de ce qui se produit. L’effet de réel est ainsi amplifié. 3. L’enfant se met à crier sans fin avant de mourir. Ce cri est symbolique de la souffrance humaine, c’est pourquoi Camus utilise l’expression « tous les hommes ». 4. Les deux hommes s’affrontent sur les sujets suivants : ––Pourquoi le mal existe-t-il, et frappe les innocents ? Dieu existe-t-il ou pas ? ––L’acceptation de la souffrance ou la révolte ? 5. Face à la mort, Paneloux défend la thèse de la religion : il faut aimer Dieu et sa création, même si on ne comprend pas tout. C’est l’acceptation. Rieux, quant à lui, refuse d’aimer une création qui fait mourir les humains et souffrir les enfants. La mort est un des aspects les plus inacceptables de notre existence, comme on le comprend quand on voit un semblable mourir, et mourir dans la souffrance. Elle est même l’un des principaux arguments contre l’existence de Dieu. La seule solution pour l’être humain est de lutter contre la mort sans attendre une aide de ce Dieu hypothétique. Le plus pressant, ce n’est pas de réfléchir sur la création divine, mais d’agir, et, pour l’instant, la seule action possible consiste à guérir les malades et à soulager leur souffrance. Ce qui réunit à la fin Paneloux et Rieux, c’est le travail, la lutte menée contre la peste. 6. Il est dit dans l'extrait que dans « l’expérience absurde, la souffrance est individuelle ». Le « mouvement de révolte » fait prendre conscience que cette souffrance est collective et qu’elle concerne tous les hommes. Elle devient l’« aventure de tous », c’est-à-dire le combat de tous: C'est ainsi que devant ce fléau de la Peste qui les frappe tous, Paneloux, Rieux et l'ensemble des autres victimes peuvent se mobiliser dans un but commun dépassant leur individualité.